Plaisante dégustation

S'il y avait bien une chose que Stan appréciait beaucoup dans son boulot, outre botter le cul de petits insolents pour leur inculquer le respect, c'était bien les soirées les célébrations diverses où iel pouvait profiter pleinement d'alcool de qualité et de croques-en-bouches. Bien sûr participer à chaque congrès était impossible mais, cette fois-ci, l'invitation au meeting inter-congrégations étaient organisées par Wild Média, ce qui promettait d'être aussi intéressant que succulent. Comment refuser ? Finissant sa journée de travail, Stan prit le luxe de prendre une douche sur place avant d'enfiler un costume propre agrémenté de ses bijoux avant de traverser la moitié de la ville pour assister à la réunion.

Forcément il y avait du beau monde et troquant son nom contre un badge iel se rendit directement au bar prendre de quoi supporter la présentation avant de papillonner comme il est d'usage durant ces rassemblements. Frappant deux coups secs au comptoir pour attirer l'attention du barman, iel annonça vouloir un verre de whisky on the rock avant de s'adosser au bar pour regarder la foule.

" J'espère qu'ils vont rester civilisés à se lécher mutuellement les bottes… " se dit-iel plus à elui-même avant que le bruit d'un verre posé à son coté n'attire son attention. Ce n'était pas le sien mais l'homme à qui il appartenait sembla entendre ses propos. Sa propre boisson arrivant, iel fit signe à l’employé de remettre la même chose à son compagnon de fortune.

” N’allez pas penser que je n’aime pas l’animation… Je préfère juste profiter de la soirée et de mes verres tranquillement. "

Les Corporations aimaient bien étaler leur pouvoir aux yeux du monde. Elle fidélisait ses rouages en les épatant de myriades de biens, d'un confort incomparable. La bourgeoisie moderne soutenue par la bienpensance de Wild Média. Toutes les Corporations et tous les Corpos pouvaient y prendre part, il suffisait de trouver le bon créneau. Ainsi, un certain chef d'équipe d'Arborae se rendit sur place, à Shinchoku.

Un repaire de journalistes, d'animateurs et de sadiques, aimant manipuler les faits. La première chose qui frappa l'homme d'affaire en arrivant dans les lieux, était qu'il ne connaissait personne. Ce n'était pas rare en soi, juste... Inhabituel. Après quelques minutes à observer les lieux, il se rendit au bar, connaissant chaque bouteille exposée par son petit nom quand elles étaient encore en usine et laboratoire. Accoudé au comptoir, il continuait d'observer la salle. Une Corpo Démon venait de se poser à proximité, c'était déjà un peu plus singulier ! On en croisait pas souvent dans ces regroupements de la haute.

Il l'écouta parler pour elle-même, plus parce qu'elle était "là" qu'autre chose. Un peu perdu. C'était malgré lui qu'il la regardait monologuer alors qu'il reposa son verre sur le bar. Répondant avec un sourire de politesse, il avait un ton calme.

"Je ne vois pas ce qu'ils viendraient faire d'autre, après tout." Il accepta le verre que le barman venait de lui préparer. "Je ne crois pas avoir le plaisir de vous connaître, Madame ?"

L'employé d'Arborae se permit de la détailler quelques secondes, espérant apercevoir un badge, peut-être un garde du corps perdu qui sait ?

L'écoutant sans vraiment le comprendre, Stan se demanda s'il connaissait les arts subtils de la haute société, à se lancer des piques de façon « inaperçu ». Ce n'était pas non plus comme si iel allait lui apprendre, après tout cela fait déjà quelques heures qu'iel était en repos et lui d'elui l'idée de faire faire des heures supplémentaires, du moins maintenant. Attrapant son verre, ses yeux tiquèrent un instant au « Madame ». Difficile pour iel de ne pas penser « putain de cis ! » avant de reporter son attention sur lui se tournant quelques peu.

« Stan Pavlorinoff. Appelez moi Stan ou agent Pavlorinoff. Et vous êtes ? »

Impossible de voir son badge de cette façon et puis même en le voyant, la convivialité restait plus appréciable. Buvant une gorgée de son alcool aux notes boisées, iel détailla du regard l'attitude et la tenue de son interlocuteur. Il était évident qu'il avait bien plus l'habitude de ce genre d'évènement. Qu'ils ne se soient jamais croisés étaient plus étonnant, bien qu'avec la foule et les affinités cela peut s'expliquer.

« Vous assistez souvent à ce genre de promotion, nan ? Il me semble vous avoir déjà vu … »

"Ars Vrana, d'Arborae. C'est une supposition toute simple, mais je suppose à votre ton et votre titre d'agent que vous venez d'Orion ou de Vae Victis ?"

Les agents d'Amber se donnaient rarement des titres similaires. De plus, soit son costume la mettait en valeur, soit elle avait réellement les muscles pour étaler Vrana sans grands efforts. Après, elle pouvait juste être du service comptable et aimer le sport pour ce qu'il en savait. Il arrivait qu'on le confonde lui-même avec les sourires de Wild Media.

"Je suis souvent à ces rencontres, oui. Je suis navré en revanche de dire que je ne vous ai jamais rencontré avant. Mea culpa, Stan ! Après, il y a souvent des bains de foule et il paraît que je parle beaucoup, vous auriez pu me croiser sans que je ne vous remarque, en effet. Qu'est-ce qui vous amène ici ? Une envie de changer d'air ?"

Sur ces mots, il reprit une petite gorgée, regardant l'agent Pavlorinoff dans les yeux. Un nom aux origines proches de siennes, d'ailleurs. Il pourrait toujours lui poser la question plus tard. Fort heureusement pour eux, le bar était plutôt long et ils ne gêneraient pas les autres Corpos à discuter ici.

Que ce soit au ton ou au titre, il avait visé juste et le hochement de tête à nom de Vae Victis lui prouvait bien qu’il avait raison. Faisant tourner la pierre glissée dans son verre pour refroidir le breuvage, iel porta celui-ci a ses lèvres pour en savourer deux gorgées. Le liquide réchauffa sa gorge comme les joues. Pivotant sur le coté pour mieux observer son interlocuteur, il n’avait pas besoin de lui confirmer pour se rendre compte qu’il avait le verbe facile. Au moins sa mémoire ne lui faisait pas défaut.

Soufflant doucement d’amusement par le nez lorsqu’il lui dit ne pas l’avoir remarqué avant, l’ébène le croyait à peine. Une personne grande, deux petites cornes sur la tête lumineuses comme deux bougies, difficile de ne pas attirer l’attention mais il l’amusa. S’accoudant au comptoir, iel reposa son verre, faisant une trace de condensation qui celui-ci.

« Je ne peux pas participer à tout sinon mon emploie du temps en pâtirait… Mais j’aime pouvoir déguster autre chose que ce que je cuisine et… l’alcool y est bon et en général les gens ici sont agréables et je n’avais tout simplement pas envie d’être seule chez moi. »

Jouant avec l’eau formé par la condensation qu’avait laissé le verre, son regard remonta à nouveau sur l’homme à côté. Non pas qu’iel cherchait à le séduire, mais il avait deviné sa branche, maintenant Stan voulait en faire de même. Difficile cependant à déterminer cependant mais il n’était clairement pas de la même filiale.

« Et donc … Ars… Que fait la personne la plus charismatique seul avec un verre alors que le gratin est tout autour ? »

Vae Victis alors... La tenue sobre aurait pu l'aider, mais il y existait tellement de Corpo morose... Quoi que Stan était un Démon, autant dire que Vrana ne savait pas bien à qui il avait à faire. Sans doute qu'elle fait partie d'une équipe d'intervention ? C'est pas la Corpo la plus tendre, après tout.

"Des sorties, de la bonne bouffe et de quoi maltraiter le foie... Vous auriez dû venir à Arborae, on a tout ça sous le coude !"

Stan venait de soulever un point que beaucoup de personnes, que beaucoup de Corpos, devait affronter. La solitude quand ils rentraient chez eux. Ars avait déjà vécu ces moments où il ne voulait pas rentrer chez lui, être entouré. Il opina sérieusement du chef, sans se départir d'un léger sourire, tandis qu'il reprit une gorgée.

"On commence déjà à se flatter l'un l'autre ? Très bien, je trouve vos cornes superbes, Stan ! Mais laissez-moi quelques minutes avant de trouver un compliment qui ne soit pas physique, je vous prie !" Ars s'amusa avant de regarder le... Gratin, comme elle disait. Beaucoup ici pouvait être classé de près ou de loin comme riche, bourgeois, arrogant... C'était leur monde, après tout. "Je fais une pause entre deux bains de foule. J'aime aussi discuter avec des inconnus et pas seulement avec mes connaissances. Et puis c'est une soirée de Wild Media, ils n'apprécieraient pas qu'on leur vole la vedette ! Puis-je demander ce que vous faites comme travail à Vae Victis, plutôt ?"

Sa remarque sur le fait d’avoir mal choisit sa corporation avait presque pu lui arracher un sourire. Quelqu’un qui connaissait bien Stan aurait pu remarquer la commissure de ses lèvres qui s’était légèrement relevé. De plus, Ars venait de lui dire lui-même de quelle branche il venait. Reprenant son verre pour boire deux nouvelles gorgées, iel s’étonna de la tournure des évènements, comprenant qu’après coup que ses propos prêtaient à interprétation. Ne cherchant pas plus d’explication, iel approuva de la tête son constat avant de répondre à sa question.

« Je n’ai pas le job le plus ouvert aux branches. Je m’occupe des nouveaux, du recrutement jusqu’à leur intégration dans une équipe. Un plaisir de les faire rentrer dans le moule … »

Le ton se voulait un peu enjoué alors que son visage toujours aussi figé n’aidait en rien à savoir s’il était question de plaisanterie ou non. Arrêtant de jouer avec la condensation, son pouce roula sur son indexe pour étaler l’eau et le sécher plus rapidement pas la même occasion.

« Et que faites-vous à Arborea ? Si vous cherchez des gouteurs pour de nouveau arrangement d’alcool je pourrais réfléchir à me faire transférer. Mais recadrer mes sales jeunes mes manquerai.»

Se faisant craquer l’épaule en la roulant, le stress de la journée semblait enfin tomber. S’installant plus confortablement dans son siège, son regard se posa à nouveau sur les petits groupes désaminés dans la salle.

« Et donc après ce verre, qu’allez-vous faire ? Je vous vois bien allez discuter avec eux. La femme à un décolleté sublime et les deux hommes ne sont pas moches non plus, loin de là. Je dirais Chimera les trois… »

L'agent de Vae Victis n'affichait pas facilement des émotions. Malgré tout, elle continuait la conversation et Ars ne pu que constater de l'écart entre les réactions physiques et les propos tenus par Stan. Pour un Démon, elle manifestait un implacable contrôle de ses expressions. Il avait presque envie d'applaudir, mais il préférait garder le sarcasme pour une occasion plus utile. Encore plus après la réponse de la Dame. Un plaisir, hein...? Stan aurait quelques pulsions sadiques que cela n'étonnerait guère Ars, désormais.

"Vous avez trouvé votre vocation à ce que je vois, c'est pour le mieux ! Je serais curieux de voir à quoi ressemble vos... Séances d'intégration. Je ne suis pas très au fait des pratiques de Vae Victis." Vrana fit tourner son breuvage dans le verre, observant le gras lentement couler sur celui-ci. "Je supervise la création de nouveaux produits et de leur mise en vente sur le marché."

Ars étira une nouvelle fois ses lèvres reposant son regard dans celui de l'agent Pavlorinoff. Un client potentiel, ma foi.
"Si vous voulez goûter de bons produits, je connais un endroit qu'il vous plairait de visiter lors de votre temps libre et de vos sorties. Je dispose d'un bar à New London, le Vitae. N'hésitez pas à venir m'y rendre visite."

Après avoir fait sa pub, il regarda du coin de l'œil les personnes désignés avec un intérêt moindre que pour Stan. Il ne voyait que quelques Corpos parmi tant d'autres.

"Leurs vêtements sont à la pointe, Chimera est possible. Wild Media ou Mitoshimaru peut-être..."

Le jeu "devine quelle Corpo" était très répandu, tel un test de personnalité.

Les séances d’intégrations étaient en dehors de son cadre mais c’était toujours amusant à regarder selon Stan. Etrangement iel frappa à la bonne porte en plaisantant à moitié sur l’envie de tester de nouveau produit. Le hasard faisant bien les choses, l’homme à ses cotés s’occupait justement ça. Son visage si neutre se laissa à hausser de quelques millimètres les sourcils impeccablement épiler de l’ébène.

Cet homme était plein de surprise. Prenant note de son invitation, iel s’exclama « Hé bien ! Vous ne chômez pas ! Ça doit pas être de tout repos ». Le temps libre était une ressource rare par moment et lui trouvait tout de même un créneau pour ouvrir sa propre boutique. Cela montrait bien qu’il était uniquement carriériste. Cela posa question à Stan, de savoir qu’est ce qui la définissait en dehors de son boulot.

Tandis qu’il regardait ou son doigt pointait, lea démon•e porta son verre à ses lèvres et finit le contenu de celui-ci avant de le poser un peu sonorement sur le comptoir avant de rappeler le barman. Son interlocuteur sembla se prêter au jeu qu’iel avait lancé sans vraiment le vouloir. Un souffle rieur elle regarda à nouveau l’homme face à elle.

« Peut-être oui… mais ce n’était pas ma question. Après vous avez raison ça ne me regarde pas… »

Stan n’était pas vexé du tout. Reportant son attention devant elui, iel resta dans le même registre un bourbon ainsi que quelques mises en bouche « histoire d’éponger un peu tout ça ». Ça ne serait pas de la grande gastronomie mais au moins l’alcool passerait moins vite.

« Vous savez dans quoi on s’est engouffré ? J’avoue ne pas avoir lu entièrement l’invitation…»

Ars inclina respectueusement la tête à la réponse de Stan. C'était agréable de voir quelqu'un reconnaître d'emblée les efforts qu'il avait mis dans ses projets personnels. Arborae, le labo, son équipe, le marketing et enfin son propre club pro-Corpo... Cela lui avait demandé un temps précieux qu'il n'avait pas investi dans des loisirs ou une vie de famille. Reprenant une gorgée, il pencha ensuite la tête en observant son interlocuteur.

"Je vous ai mal compris, alors." Il haussa à peine les épaules. "Pour ce qui nous regarde ou non... Avec le nombre de caméras et de demande d'identification, la vie privée est déjà à classer à l'archéologie. Vous me parliez d'autres de la beauté de ces gens, alors ? Ils ne sont pas désagréables, je vous l'accorde." Un brin moqueur sans devenir condescendant, il continua avec malice. "Êtes-vous en chasse pour ce soir, Stan ?"

La question n'appelait pas réellement de réponse et Ars se permit surtout cette taquinerie déplacée car il était face à un Démon, bien plus honnête en général qu'un Humain lambda sur leurs désirs. Des conversations plus rafraîchissantes et animées découlaient souvent de leur simple présence.

"Pour l'invitation de Wild Media, oui. C'est courant chez eux, ils veulent lancer de nouveaux programmes pour les années à venir et demandent aux confrères des avis, ce qu'il faudrait mettre dans les feuilletons pour profiter à Amber... Ils assurent en un sens les bons rapports entre les Méga-Corpos. En d'autres termes, c'est purement politique ce qu'il se passe pour eux, ce soir."

Sans s’offusquer de sa question intimiste, Stan haussa les épaules dans un petit mouvement de tête vague en guise de réponse. Venu•e de profiter de ce que la sauterie avait à lui offrir, que se soit alcools, mets ou compagnies, iel ne dirait pas non à un petit extra à rapporter à la maison s’il devait se présenter mais de la a dire qu’iel était en chasse… Si tel était le cas, l’ébène ne serait pas accoudée au comptoir mais plutôt en train de papillonner, son verre en main.

Prenant quelques crackers que le barman venait d’apporter, Stan les avala sans ménagement en écoutant son compagnon de fortune. Si c’était purement politique, le comptoir avait un nouvel attrait car passer de la brosse à reluire n’était clairement pas son truc sauf quand il est question de mettre quelqu’un dans son lit.

« Ah je vois… Maintenant que je le sais, cette soirée ressemble de plus en plus à une orgie de complaisance… »

Soupirant doucement en mâchant un nouveau biscuit, iel préféra jeter son dévolu sur le large choix de bouteilles plutôt que sur les personnes présentes. Au moins la conversation avec l’homme d’à côté était plus simple.

« Et vous Ars ? Vous tentez votre chance après de … ces dames ? Sans copilote ? » Réfléchissant en l’observant un peu mieux et constant aucun bijou à son annuaire, iel reprit. « Remarquez, du peu que vous m’avez parlé de vous et vu votre physique, vous ne devez pas avoir de difficultés à trouver un partenaire… Je ne serais pas étonnée•e d’apprendre que vous avez reçu plus d’une demande en mariage ! »

Stan devenait véritablement chaleureuse dans sa gestuelle et dans ses mimiques. Très féminine ! Ars s'amusait à ironiser intérieurement en refusant de manger les crackers, songeant à ses collègues qui bossaient dessus.

"Je... Je dois admettre que vous avez trouvé de bons termes pour désigner ce rassemblement mondain. C'est à peine moins austère qu'une salle de réunion, en soit. Au moins, on a le droit de boire de l'alcool."

L'agent d'Arborae repoussa son verre sur le comptoir. Il restait un fond, mais il avait bu deux verres assez vite. Au final, il préféra relâché un peu sa consommation avant de devenir une gêne pour autrui ou bien lui-même.

"Comme vous, je suppose que je ne suis pas venu pour cette raison, mais je n'irais pas la refuser si elle se présente. Enfin, je dis comme vous, mais arrêtez moi si je me trompe." Ars s'étonna en entendant le mot mariage, quelque peu, avant de poursuivre. "Qui n'a pas reçu de demande d'autrui, en un sens ? Tout le monde doit bien être le fantasme de quelqu'un. Mais vous m'intriguez, vous avez l'habitude d'être le copilote, le faire-valoir de vos amis lors de ces réunions ? Ou ce sont vos amis qui vous aident ?" Ars détailla du regard Stan, presque involontairement. La tenue qu'elle portait dénotait beaucoup avec les femmes présentes ici. Il laissa échappé un léger rire à une pensée. "Je vous imagine, avec un collègue de Vae, vantant vos qualités à qui veut l'entendre."

Stan ne l’arrêta pas dans sa supposition, il avait vu très juste à la fin. Sa remarque sur les demandes en mariage l’étonna un peu au point de se demande s’il fallait lui préciser qu’iel faisait parti de ses personnes qui n’en avaient jamais reçu. Songeant qu’il penserait qu’iel s’apitoyait sur son sort, l’ébène se ravisa.  

Ses questions lui soutirèrent un soupire d’amusement.

« Je ne suis pas aussi sociable que vous… Mon seul ami n’est pas très fan de ce genre de chose donc je fais cavalier seul. »

Son commentaire l’étonna au point de manquer de s’étouffer avec les biscuits qu’iel avale de travers. C’était bien la première fois qu’on lui disait ça.

« Essayez-vous de me caser ? »

Etant de Vae, Stan connaissant tout de même du monde là-bas, iel était maintenant curieux•se de savoir qui il lea couplait comme ça. Heureux hasard voudrait que se soit son ami, mais demande serait mal venu. Buvant une gorgée pour faire passer l’irritation dans sa gorge.

« Je vous remercie mais je pense qu’il est trop tard pour que quelqu’un s’attache à moi… »

Il n’y avait pas de sanglot, pas de regret dans sa voix, juste un constat froid. Iel se faisait « agé•e » pour un•e démon•e. Il faut dire que Stan avait mis aussi suffisamment de distance avec ses conquêtes pour éviter justement ce cas de figure.

« Oh je ne vais pas vous embêter avec des regrets, ne vous inquiétez pas.  Je préfère profiter du temps qu’il me reste et …» levant son verre pour boire une gorgée tout en lui faisant un clin d’œil « … je ne me retiens pas de faire ce que je veux sans chichi. »

L'agent d'Arborae inclina de surprise la tête en entendant "seul ami". Était-elle si peu sociable ? Les Démons étaient du genre à apprécier faire la fête de ce qu'il avait entendu, peut-être des préjugés ? Ou était-elle l'exception ? Ars haussa intérieurement les épaules, après tout, Stan gérait sa vie comme elle l'entendait. Il ne put s'empêcher de rire, entre sympathique et moqueur, quand elle s'étouffa presque.

"Vous caser ? Non, je n'ai pas de tels loisirs. Pourquoi Diable, irais-je vous dicter votre conduite, enfin ?" Néanmoins, Ars ne s'attendait pas à la suite. Il en perdit le sourire une seconde avant de se ressaisir, ne voulant pas témoigner de pitié ou quoi que ce soit de la sorte. "Tant que cette solution vous convient, Stan. Rassurez-vous, vous ne m'embêtez pas, au contraire. J'aimerais d'ailleurs, si vous... Permettez-moi d'être indiscret un instant, ne songez-vous pas à Pactiser ? Cela rajoute quand même un certains nombre d'années. Je suis certains que vous êtes capable d'accepter votre fin, mais pourquoi ne pas profiter de la vie en attendant sa venue ? Même un peu plus ? Cela vous est-il véritablement égal de faire votre temps ou c'est plus simple de le croire ?"

Le manque de tact et de subtilité ne le caractérisait pas, mais il n'avait pas l'impression de devoir en faire preuve devant elle. Autant être franc et direct. Au pire, elle se vexerait et partirait, au mieux il aurait une réponse. Enfin, le pire serait peut-être qu'elle m'en colle une au passage. Songea-t-il en détaillant la droiture des épaules de l'agent de Vae Victis, poursuivant jusqu'à l'assurance de ses mains. Ouaip, j'aimerais pas ça.

Iel n’avait pas de vague à l’âme. Depuis son enfance on l’avait préparé à l’inévitable fin qui arriverait dans la fleur de l’âge pour les humains. Cela ne rend pas la chose plus facile à accepter mais à quoi bon lutter contre inéluctable fin qui pesait sur sa tête depuis sa création ? Les sept étapes du deuil étaient bien loin derrière elui maintenant, même si l’étape de la colère avait durée un long moment.  Sa compagnie semblait étonnée de l’étrange sérénité dont iel faisait preuve. Ses questions étaient des plus classiques, ce qui amusa l’ébène, sans doute tout autant que les réponses qu’iel apporterait.

« Ah je ne dirais pas non à quelques années supplémentaire. Dis dans votre bouche ça a l’aire si simple… Mais réfléchissez-y. Trouver quelqu’un prêt à sacrifier quelques années pour un pouvoir inconnu… Réussir à faire le pacte alors qu’on ne sait pas vraiment comment cela fonctionne… »

Les yeux un peu perdus dans le vague en fixant son verre, Stan s’imagina toutes sortes de rituels étranges comme ceux qu’iel a pu entendre pour réussir un pacte, un léger sourire s’incrusta aux coins de ses lèvres.

« Dans qu’elle mesure ça ne serait pas faire souffrir une personne de plus autour de moi ? Si j’ai plus de temps, peut être que c’est finalement une cirrhose du foie qui me tuera ! »

Finissant son verre, iel le repoussa pour se concentrer sur quelques mises en bouche. Ne s’étant nullement offusqué des questions, lui retourner lui semblait la moindre des choses pour le mettre face à ses propres questions en la matière ou a celles qu’il avait pu avoir à un moment.

« Et vous, Ars, vous avez déjà pactisé ou vous avez déjà songé à le faire ? »

"La simplicité a du bon, quand on arrête de réfléchir aux détails et que l'on prend ce que l'on veut vraiment, en faisant fi du reste." Ars marqua une pause, regardant avec sérieux son interlocutrice. "Moi qui pensais les Démons experts dans le domaine... Vous avez une flegme qui force le respect."

Ici, ce n'était pas dur à trouver, ce genre de paumés qui voulaient un pouvoir, même au prix de leur vie. Enfin, quand on voit ce que la basse population en fait, on peut comprendre que survivre moins longtemps dans la fange en échange d'un petit boost, d'un pouvoir défiant la logique, ça en motive plus d'un. Leur vie ne vaut pas grand chose, ils font une bonne affaire ainsi. Le problème résidait plus dans le Démon qui devait accepter la personne, ça, c'était toujours plus difficile.

"Faire souffrir une personne de plus... Vous avez quelques squelettes dans les placards, Stan ?" Le ton laissé deviné que c'était rhétorique. Après tout, entre Corpos, qui n'en a pas ? Ars voyait qu'elle avait déjà établie ses idées et il ne voulait pas la remettre en question alors qu'il n'avait rien à voir avec ça. "Pour ma part, j'y ai déjà songé. J'ai pesé le pour et le contre, de savoir si oui ou non, je souhaiterais pactiser un jour. Je ne cache pas que je suis très curieux de ce que ça pourrait donner ou de quelle vie ça m'apporterait... D'un autre côté, j'ai déjà beaucoup à faire avec mon travail, je n'ai pas le loisir de bâtir une relation sincère avec une personne pour pouvoir effectuer la... Perversion avec elle.

Le respect, un mot qu’iel appréciait grandement et qu’il l’emploie pour sa personne l’emplissait de fierté. Pourtant, juste après lui avoir dit cela, il l’accusait de vices cachés. Comme tous les démons, et sans doute une bonne partie de l’humanité également, Stan en avait mais iel songea d’abord qu’il avait mal interprété ses propos. Nulle envie de le reprendre sur cela pourtant. Surtout que lui aussi ne se voyait pas non plus établir ce genre de contrat. Soupirant doucement à la fin de sa phrase iel reprit.

« Que ce terme est déplaisant… Je préfère voir ça comme de la passion. Mais nous sommes d’accord que nouer ce genre de lien demande du temps et de l’investissement… Peut être que si je rencontre la bonne personne, celle qui remet tout en perspective… »

Ses mots ses suspendent alors que donnant une pichenette dans une cacahuète tombé hors du ramequin, celle-ci se projette plus loin derrière le bar avant de reporter son attention sur la salle à la recherche de quelques choses.

« C’est plus facile de les voir comme des personnes avec qui potentiellement partager un moment de plaisir et disparaitre que de s’imaginer que l’un deux puisse être un partenaire, un ami ou que sais-je…  »

Chassant presque ses pensées étranges d’un geste de la main, Stan préféra revenir à des sujets plus légers.

« Peut-être qu’en me liant le contractant pourra changer l’eau en whisky ou me faire décuver d’une caresse. Hm ! Là c’est sûr que je serais bien attaché à lui ! Si vous pouviez choisir, vous aimeriez quoi vous ? »

Oh ? Stan ne semblait pas si insensible qu'Ars le pensait de prime abord, concernant les termes courants pour désigner les Démons et les Pactes. L'agent d'Arborae nota cela, comme si cela recelait d'une quelconque importance. La Dame face à lui était plutôt atypique des Démons qu'il avait croisés par le passé.

"De la passion, qui remet en perspective... C'est une agence matrimoniale qu'il vous faudrait, pas un contractant." Ars se moqua sans méchanceté, faisant sans le dire le parallèle avec le mariage dont ils parlèrent quelques minutes plus tôt. "Mais je vous rejoins quand vous dites que partager un moment est plus évident qu'une vie. Retirer ses vêtements et moins contraignant que d'ouvrir sa vie."

Dévoiler son intimité était devenue bien plus proche d'une acceptation spirituelle que d'une fusion charnelle. Bien plus de personnes acceptaient partager un coup d'un soir que de simplement accorder à une autre personne la capacité de déverrouiller son téléphone portable. Ars devint pensif quelques secondes, à cette idée.

"Ce qui me ferait plaisir... Décuver, certainement pas ! Je n'ai pas choisi Arborae au détriment de Mitoshimaru pour rien ! C'est une colle que vous me posez, j'ai toujours tenu loin de moi l'idée de céder mon espérance de vie. Surtout quand on ignore quel pouvoir l'on reçoit. Mais... " Le carriériste ferma les yeux en se tenant le menton, réfléchissant un instant. "Probablement... Connaître les pensées d'autrui ? Détecter les mensonges et les semi-vérités ? Ce serait vraiment sympa, je suppose. Vous savez quel est votre don, d'ailleurs, Stan ?"

Sa boutade était passée comme une lettre à la poste. Bien que légèrement irrespectueux pour sa façon de voir les choses, iel avait saisit l’allusion aux histoires de couples dont ils parlaient plus tôt, et ne s’en offusque pas, trouvant même cela assez habile. Ils étaient d’accords mais peut être pas pour les mêmes raisons. Lui qui avait encore toute une vie, justement, pour l’ouvrir à quelqu’un, trouvait cela difficile dans leur contexte actuel peut-être. Mais pour Stan tout revenait à cette histoire de sursis pour mieux en mourir.

Le fait de pouvoir désaouler à souhait ne lui plaisait pas, ce qui lui étira un mince sourire en pensant que le mal de crâne, la vision trouble et la bouche pâteuse avait encore de fervents partisans. Des pouvoir très « classique », très attendu et utile. Sa question l’étonna un peu puisque quelques secondes plus tôt, lea démon•e lui fit part de ses fabulations sur les dons qu’iel pouvait donner. Gobant une cacahuète en la lançant dans les airs, son coté moins classe reprenait légèrement le dessus.

« Pas du tout ! » lacha-t-iel avant de croquer dans la graine. « Peut-être quelques chose en rapport avec l’ouïe ou les émotions si je me base sur mes propres particularités … Il ne me semble pas que l’on puisse savoir autrement qu’en concluant. »

Cela dit, un petit clin d’œil malicieux parti dans sa direction pour lui montrer qu’iel pouvait faire aussi des plaisanteries sur le parallèle entre pacte et relation. Stan se trouva tout de même moins doué•e que lui.

« Je vous repaie un verre ? On a le temps, leur blabla ne m’intéresse pas. Par contre elle … » pointant alors une bouteille à l’allure atypique « … beaucoup plus ! »

"J'imagine que oui. Ma question n'était pas si pertinente s'il faut pactiser pour savoir cela. L'ouïe ou les émotions..." En répétant ces mots, Ars ne pu s'empêcher de regarder les oreilles si caractéristiques du Démon, avant de la regarder dans les yeux avec insistance. "Une particularité avec les émotions... Vous voulez dire comme les contrôler ou les inhiber ?"

Aussi curieux que perplexe, on ne pouvait pas dire que cet Humain était très doué sur le sujet. Pas qu'il en était désintéressé, juste que ce n'était pas sa branche. Ses liens avec la science se rapprochait plus de la chimie que de la biologie. Stan lui arracha sans mal un sourire quand elle parla de continuer à boire.

"Je ne saurais vous contredire, elle a des formes généreuses." Toujours en fixant la bouteille en verre, il appela le barman pour qu'ils aient de nouveaux leurs verres remplis. "Vous avez une sacrée descente. Je suspecte que ce n'est pas la première fois que vous faites ça. À un meeting ou non, même. J'ose espérer vous revoir à mon club très bientôt, alors. Cette fois-là, ce sera à moi de vous offrir un verre."

L'agent d'Arborae leva son verre, pour trinquer avec Stan. Sans elle, il serait sans doute aller se mêler à la foule hypocrite qui leur tendait les bras, jouant lui-même des tournures de phrases les plus viles pour arriver à ses fins, comme décrocher des faveurs, des opportunités ou même des clients. Bien qu'il essayait tout de même de faire de Stan une cliente régulière de son propre bar. Cette pensée ne sembla pas lui poser un quelconque problème moral, comme en témoignait son sourire franc.[/i][/i]

L’homme semblait s’intéresser à ses hypothétiques pouvoirs. Si l’idée de contrôler les émotions lui venait de ses cornes qui reflétaient bien trop souvent son état d’esprit à son goût, Stan devait admettre qu’augmenter, inhiber ou induire un sentiment plutôt qu’un autre avait quelques choses d’élégants comme intéressants. Ses cornes étaient bien plus honnêtes en luisant en cet instant que son haussement d’épaule incertain quant aux possibilités du don de son pacte.

Il comprit tout de suite qu’elle voulait boire encore et en bon marchant, bien amené cela dit. Poussant doucement son verre pour le tenancier le remplisse à nouveau, Stan regarda la beauté du liquide ambré emplir son verre. Une bonne descente du coude oui. Levant son verre en réponse à l’agent d’Arborea, iel en dégusta une première gorgée.

« C’est pour me mettre dans l’ambiance de l’after… Cette belle bouteille est très intéressante mais … elle sera de mauvaise compagnie dans mon lit. »

Finir accompagné d’un ou d’une partenaire de nuit n’était toujours pas exclut pour l’heure. Malgré l’ivresse montante, iel se sentait toujours en état de séduire et de profiter pleinement de sa soirée. Peut-être que d’ici quelques minutes ce ne serait plus le cas pour autant mais Stan prendrait le risque de rentrer seul•e le cas échant.

« Vous voulez m’accompagner pour la suite ? Je ne dis pas qu’ici c’est nul mais… les personnes de ce soir sont un peu trop coincé à mon gout. »

La lueur qui émanait des appendices de Stan avait de quoi surprendre. Ars s'autorisa même un regard insistant dessus, se retenant certainement moins avec tout l'alcool déjà ingéré. Il pouvait garder son sang-froid, mais pour quelque chose comme ça alors qu'il discutait sans se soucier de quoi que ce soit, il mit quelques secondes avant de reporter son attention sur le regard de la personne à ses côtés.

"A vous écouter, vous semblez bien seule. Cette bouteille ne remplacera pas qui que ce soit dans un lit, mais au moins, vous ne serez pas surprise en vous réveillant à ses côtés avec la gueule de bois."

L'agent d'Arborae leva un toast à sa propre phrase et écouta avec une lueur d'intérêt dans le regard la suite. Avec un Démon, cela voulez tout et rien dire. Encore plus avec un Démon qu'il ne connaissait pas. Par instinct de survie, Ars pesa le pour et le contre. Il pouvait toujours être absent une demi matinée au travail si besoin, pensant encore au travail, même dans cette situation. Au final, il reposa son verre avec soin sur le comptoir, ne le terminant pas.

"Avec plaisir Stan. Prenons congé."